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contes mortems et hallucinogèns

10 février 2006

Paul et Paul (aucun lien avec Ding et Dong)

S

ous un ciel mauve, je roulais plutôt rapidement sur l’autoroute. Les arbres en carton étaient noirs et anorexiques, leurs branches furent disposées à supplier pour la pitié. Le gâchis, quant à lui, mettait bien en valeur ses cicatrices du passé. Et moi, disons que je suivais gaiement les magnifiques briques jaunes, le crâne bien farcis.

C’est alors qu’au coin de Vaudeville et Godemiché, un joli petit choucas est venu se désarticuler, lentement mais sciemment, sur mon pare-brise la plexiglaçe d’une tombe exhibitionniste. L’oiseau me regardait. Il me dévisageait, il me hantait. Puis il roucoula un cri qui fracassa la vitre en mille échardes rouillées qui firent pleurer cette fillette inconsciente, allongée sur mon plancher cérébrale, les jambes écartées comme une sale pute. Une canne en friandise s’agite entre ses lèvres. Pendant que j’hurlais, ma voiture culbuta sur un petit garçon comme piéton. Mon crâne se vida sur le toi(t) pendant que cette carcasse roulait si près de moi.

Je sortis de ma voiture pour admirer ce mannequin en porcelaine qui portait mon masque d’Arlequin et qui traînait sa sacoche remplie de graines. La première chose que je remarquai fut ses longs doigts, tous crochues mais quand même rigides. Au fait, quand j’y pense, il portait aussi le même chandail que moi, le même pantalon et même les mêmes Rangers.

«P-Paul, est-ce vraiment toi Paul? Je te croyais partie à la grande et éternelle guerre. J’ai gardé ma robe de mariée avec moi, dans ma valise, juste au cas où cette occasion se serait présenté.»

Un bouton scellait ses lèvres, l’empêchant ainsi de me répondre. Cette attache était reliée à une extension livide de sa pomme d’Adam.

Mais le fusain se volatilisa. La fillette me regardait derrière ses œillères coagulées. Elle est debout et me guette du fond de ma fosse sceptique. Du sprite ruisselle de ses entonnoirs charnels greffés sur son cadavre. Elle voulait m’abreuver.

«Paul, est-ce toi que j’ai vue défleurir ma petite fille.»

Il me regardait avec ses petits pois vert, si vulnérables et solitaires, tous écarquillés derrière le masque. Mais la moribonde, quant à elle, chantait. Ses plaintes résonnaient sur le rocher.

«Ne me ment pas Paul. Je t’ai vue te servir de ces appas et ces hameçons pour te divertir. Je t’ai vue germer avec la trique à l’air. JE T’AI VUE AVEC MA FILLETTE.»

Il se leva et défit le coquelicot de ses lèvres. Puis jaillit de cette nouvelle orifice un nectar jaunâtre accompagné de deux yeux et de ce qui semblait être le balbutiement d’une abeille calcinée. Les yeux me fixaient. Il y en a même eu un qui cligna.

Je crois que je fus un peu affolé par la suite. Pris soudainement par une haute tige qui m’empalait, je ramassai l’axe qui dormait dans ma voiture et l’enfonça dans le crâne en pastelle de mon copain. De la plaie luisait un joli petit cerveau bouillonnant, tout rose comme du chewing gum. Il avait l’air appétissant. Je me maculai donc les lèvres de sa confiture. Je fis de même avec son cœur.

Curieusement, ça goûtait le fruit ankylosé.

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